Décès de Jean-Jacques de Granville, le botaniste qui a consacré sa vie à la découverte de la flore guyanaise

Le botaniste qui a laissé des connaissances innombrables de la flore guyanaise, Jean-Jacques de Granville, nous a quitté le 13 décembre à l’âge de 79 ans. C'était une référence dans le domaine, il emporte avec lui un bagage de savoir. Retour sur la vie du scientifique.
La Guyane a perdu une figure emblématique dans la recherche de la biodiversité tropicale, incommensurable dans ce département d’outre-mer. Jean-Jacques de Granville, né en 1943, est un botaniste spécialisé dans les palmiers. Il décède le 13 décembre 2022, à l’âge de 79 ans. Il aura eu une vie riche en découvertes, en partages, en implications et en enseignements. Sa disparition peine les scientifiques de la nature.
Jean-Jacques de Granville entame sa carrière en 1970. Il a réalisé 231 documents dont 117 publiés avec 6 livres, 3 thèses de doctorat et une participation à 27 ouvrages de synthèse. Il est décrit comme un botaniste infatigable sur le terrain, créatif et très bon dessinateur. “C’est une référence de la biodiversité guyanaise qui s’est envolée. Il a sillonné le territoire de toutes les façons possibles pour découvrir la flore. Il ne s’arrêtait jamais. Nous sommes tous très touchés”, confie Marie Fleury, ethnobotaniste au Muséum National d'Histoire Naturelle de Guyane. Au cours de sa vie, il déposera dans les institutions internationales près de 19 500 échantillons d'herbiers.
Titulaire en 1968 d’un diplôme d’étude approfondie de botanique tropicale, le naturaliste a 24 espèces végétales, une grenouille (Anomaloglossus), un papillon (Lycomorphodes) et un longicorne (Zeale) qui lui sont dédiés. Mais surtout, un genre d’orchidée (Degranvillea). "Jean-Jacques était un point de repère incontournable pour le réseau de scientifiques du monde entier avec qui il partageait avec constance, dévouement et rigueur, la connaissance et la volonté de conservation de la nature guyanaise et sud américaine", souligne le botaniste Bruno Bordenave.
Le botaniste, au cours de sa vie, s’est impliqué dans la création des aires protégées, des Zones Naturelles d'Intérêt Écologique, Faunistique et Floristique (ZNIEFF) et l'élaboration de la première liste d'espèces végétales protégées de Guyane. Jean-Jacques a été également l'un des pionniers dans l'exploration des lieux reculés et à l'époque difficilement accessibles, comme Tumuc-Humac, Mont Saint Marcel, Monts Arawa, Atachi-Bakka... Il est, entre maintes autres initiatives fructueuses, à l'origine dès 1975, de l'idée de création d'un vaste parc naturel de Guyane centré autour de Saül, relancée en 1992 et finalement crée en 2007 sous le nom de Parc amazonien de Guyane.

Durant sa carrière, le scientifique s’est spécialisé dans l'étude des palmiers. Il a décrit quatre espèces : Asterogyne guianensis, Bactris nancibaensis, Bactris pliniana et Geonoma oldemanii. Il a d’ailleurs publié le Guide des Palmiers de Guyane en 2014 et donné des cours à l’université d’Utrecht sur ces arbres à cocotiers. Sa fille, Catherine le définit comme un "chercheur dans l'âme, un vrai pédagogue, il était amoureux de la Guyane".
On peut aussi voir le scientifique, en tant que producteur animalier, dans des films tournés en Guyane comme « 600 kg d’or pur » avec Clovis Cornillac, Patrick Chesnay et Bruno Solo.
Il a été conservateur de l'Herbier de 1998 jusqu'à sa retraite en 2008. "Sa disparition est une terrible nouvelle. Il était passionné, la flore guyanaise n’avait presque plus de secret pour lui”, adresse Véronique Bilot, technicienne à l'Herbier Guyane et ancienne collègue du botaniste. “Jean-Jacques était d'une grande gentillesse, il adorait le carnaval et créait toujours de magnifiques costumes".
