Philippe Dulbecco devant les enseignants du collège Paul-Berthelot de Javouhey, le 4 septembre 2023. • SZ
Le recteur s'est entretenu longuement avec France-Guyane alors que 90 000 élèves ont repris le chemin de l'école. Il revient sur les problèmes de ressources de l'académie.
Les ressources humaines manquent dans l'académie. Seulement, 30 % des postes ont été pourvus au concours externe des professeurs des écoles. Comment bien éduquer sans adulte en face des enfants ?
Nous avons des ressources manquantes. C'est incontestable économiquement et humainement. L'argent, il faut aller le chercher, il y a des lignes budgétaires disponibles. Toutes les questions peuvent se résoudre sauf celle de l'humain. On doit être plus attractif.
C'est un constat d'échec, notamment de l'Inspe (Institut national Supérieur du professorat et de l'éducation) ?
Non. Je suis économiste donc les chiffres comptent. Nous accueillons en moyenne 2 000 élèves de plus chaque année. Pour cette rentrée, nous sommes à 1 200 élèves de plus dans le 1er degré et nous ouvrons 40 classes [soit un ratio d'une classe pour 30 élèves,NDLR]. Dans le second degré, les effectifs stagnent, pour autant nous avons obtenu deux classes en plus au collège et 17 en lycée.
« Nous sommes dans la moyenne nationale »
Dans le premier degré, nos effectifs ont augmenté de 13 % et de 20 % dans le second degré en dix ans. Pendant ce temps, le nombre de personnels a progressé de 40 %. Nous bénéficions de 9 500 personnels dont 75% d'enseignants. Nous sommes dans la moyenne nationale.
Concernant les concours, nous devions pouvoir 250 emplois de professeurs des écoles. Nous avons réussi à en recruter 151 dont 47 par le concours exceptionnel avec un accès à la titularisation de ceux qui n'ont que 18 mois de CDD au lieu des trois ans requis. Nous avons donc un déficit de 99 postes, c'est incontestable. Je relève que dans ces concours, il y avait 1 174 inscrits pour 512 présents et 141 candidats admis. Nous devons donc améliorer notre vivier.
« On n'apprend pas dans un contexte dégradé »
Comment faire ? La crise des vocations est nationale.
Oui, et le gouvernement l'a compris. Gabriel Attal, le ministre, a annoncé une revalorisation du socle mensuel de 125 euros à 250 euros. Hors primes, un enseignant entame sa carrière à plus de 2 100 euros dans l'Hexagone contre 1 700 euros en 2020. Et puis, il y a le pacte. Si on prend trois briques, on peut améliorer son salaire de 750 euros par mois.
Nous devons aussi améliorer la formation des étudiants. Une feuille de route a été mise en place entre le rectorat, l'Inspe grâce à la participation de l'inspection générale.
"Heureux et volontaire pour être devant les élèves"
Nous connaissons en Guyane une injonction contradictoire avec les contractuels. Beaucoup préfèrent être recrutés via ce système plutôt que de passer les concours. J'ai fait en sorte que ceux qui donnent satisfaction, qui sont heureux et volontaire pour être devant les élèves, dans des sites peu attractifs, reçoivent des garanties. Ils obtiennent un CDD de trois ans puis on les cdisent. Cela incite moins à passer le concours.
L'académie a connu des phénomènes d'insécurité à l'intérieur des établissements et à leurs abords. Qu'avez-vous mis en place pour lutter contre cette réalité ?
Nous travaillons ardemment sur Saint-Laurent à ce problème. C'est un sujet de socle : on n'apprend pas dans un contexte dégradé.
Philippe Dulbecco lors de sa venue le mardi 18 octobre 2022 au carrefour du lycée Bertène Juminer (entouré des deux proviseurs-adjoints Moïse Edwin et Mehdi Rharbaje)
• CG
Après les assises de la sécurité en septembre dernier, nous avons décidé d'agir sur cinq leviers : la vidéo protection des bâtiments, le renforcement de la vie scolaire. Nous avons obtenu plus de postes d'AED et de CPE. Nous créons une brigade mobile de CPE. Ensuite, nous devons travailler avec les familles, les faire venir au collège mais comment faire ? Pour l'instant, les dispositifs mis en place ne ciblent pas ceux qu'on voudrait voir.
La première partie de l'entretien est sur notre site.