« Je ne suis pas ému par cette situation »

L'agenda du ministre délégué aux Outre-mer s'est adapté à l'urgence de la ville de Cayenne. Jean-François Carenco en Guyane depuis vendredi jusqu'au 14 décembre s'est rendu au camp installé aux abords de la cathédrale Saint-Sauveur, hier soir.
Y va, n'y va pas... Vers 19 heures, vendredi soir, une certaine effervescence secoue les cabinets de madame le maire de Cayenne et du ministre délégué aux Outre-mer. Le premier souhaite que Jean-François Carenco, ministre délégué aux Outre-mer visite le camp de réfugiés aux abords de la cathédrale Saint-Sauveur dans le cœur de la ville. Le second hésite.
Finalement, décision est prise de s'y rendre mais aucun direct n'est autorisé.
La visite ne durera pas plus de dix minutes.
« Ce n'est pas possible que cette situation dure pour les habitants de Cayenne. C'est une situation particulière. Ne mélangeons pas toutes les populations. Y en a qui reste d'autres ne font que passer. Il faut analyser précisément cette composition pour trouver les bonnes solutions. J'étais préfet de Paris, il y avait 3 500 personnes à reloger le matin même. Je ne suis donc pas ému par cette situation. Je le suis pour madame le maire de Cayenne à qui j'apporte mon soutien public. Elle n'a pas besoin de ce problème supplémentaire », affirme le membre du gouvernement.

Les migrants, présents sur place, notamment des Sahraouis, du Sahara occidental (sud du Maroc) et des Afghans tentent de sensibiliser le ministre à leurs conditions de vie déplorable.
« Je suis là depuis le 3 octobre. Personne ne vient nous voir. Nous n'avons pas de toilettes, aucune association ne nous donne à manger ou nous soigne. C'est désastreux. Il y a des enfants parmi nous », décrit un Afghan. Un autre s'inquiète d'une dame sous dialyse qui se rend à pied à l'hôpital trois fois par semaine.
« Premièrement, je considère que ce n'est pas bien que vous soyez dans la rue. Donc cela va cessez. Vous avez eu le choix de venir. Vous avez en général l'asile. J'ai du respect pour les souffrances que vous avez subies mais il faut taper les passeurs qui vous amènent ici. Combien avez-vous dépensé pour venir ? », questionne le ministre. « 4 000 dollars », répond un des Sahraouis.
Un prix qui interpelle car fortement en baisse. Les premiers réfugiés venus de Syrie, il y a trois ans, déboursés 18 000 dollars puis c'était 8 000 dollars depuis le Venezuela, il y a deux ans. Dorénavant, c'est 4 000 dollars. Les passeurs doivent être les seuls à ne pas être touchés par l'inflation des carburants...
Aujourd'hui dans ce camp, une soixantaine de personnes vivent. Il y a quelques « Syriens »... qui parlent parfaitement espagnol, la plupart sont vénézuéliens, des Sahraouis... qui parlent très bien espagnol et des Afghans.
C'est une filière bien établie qu'empruntent donc ces réfugiés. Entre 2015 et 2020, la Guyane a dû gérer un peu plus de 20 000 demandes d'asile. Il y a seulement 1 200 places d'hébergements prévus pour les demandeurs d'asile en Guyane d'après Guyane la 1ère. Sur internet, ce sont 700 places réservées à ces personnes. Quelque soit le chiffre, c'est bien trop peu malgré les hébergements d'urgence dans les hôtels.
Immigration en chiffres
En 2020, la Guyane a accueilli 2765 demandes d'asile 63.60 % Haïtiens 16.95% Syriens et Palestiniens 9.87% Cubains 3.76% Dominicains Pour 2021, chiffres de novembre, on recensait 2854 demandes d’asile 73% Haïtiens 12% Syriens et Palestiniens 3% Cubains 3% Dominicains. Selon l’ OFPRA (Office français de protection des apatrides) et la Croix Rouge entre 2005 et 2014, 7934 demandeurs d’asile (hors mineurs) avaient été recensés en Guyane et sur la période de 2015 à 2020, ces demandes ont fait un bond et sont passées à 20 263. Ces trois dernières années plus de 11 000 demandes ont été déposées en Guyane. Il faut néanmoins savoir que plus de 95% de ces demandes font l'objet de refus et cela concerne majoritairement les demandes des ressortissants haïtiens. source : Guyane la 1èreL'immigration en chiffres
« J'ai conscience de l'urgence mais j'essaie d'annoncer des choses sûres et certaines. Donc non, il n'y a pas d'annonce sur ce sujet », se dédouane Jean-François Carenco. Régina devait ouvrir un centre, le projet est en cours, nous dit-on... Un centre a ouvert vers le camp du Tigre.
Par ailleurs, lors d'une visite ce matin, à la Zac Palika, le Mom a prévenu qu'il n'expulserait personne dans les habitats spontanés s'il n'y avait pas de projet immobilier sur la zone ou s'il n'y avait pas de possibilité de relogement.