Café guyanais : expérimentations avant la première tasse

Café guyanais : expérimentations avant la première tasse

Audrey VIRASSAMY

De Saint-Georges à Saint-Laurent, en passant par Roura et Régina, plusieurs personnes sont intéressées par la production d'un café guyanais. Le projet a démarré il y a trois ans avec le Cirad. Depuis, l'affaire piétine un peu.

Le café cultivé chez nous est un hybride entre l'arabica et le robusta. (AV) © photos : Audrey Virassamy

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Les plants sont cultivés à Sinnamary par le Cirad. Ils sont ensuite mis en exploitation chez des agriculteurs, toujours dans une phase d'expérimentation. (AV)

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Didier Tcha cultive du café. Mais ses 7, 5 hectares de caféiers n'ont pas encore donné la moindre goutte de café. « C'est normal, je les ai plantés depuis cinq mois, explique, pédagogue, l'agriculteur de Régina. Pour la récolte, il faudra attendre trois ans. » D'ordinaire, Didier Tcha produit des ramboutans, des ananas, des courgettes et des concombres. Si à cette production, plus classique, s'est ajoutée la plantation de café, c'est parce qu'il croit au projet initié par le Cirad. Le Centre de coopération internationale en recherche agronomique et pour le développement travaille depuis trois ans sur une sélection de plants de caféiers hybrides d'arabica et de robuste, l'arabusta.
Aujourd'hui, ce sont ces mêmes pieds qui se retrouvent chez Didier Tcha. La parcelle est expérimentale. Comme le Réginalais, d'autres agriculteurs ont accepté de tester la plantation de café. L'idée étant de passer à une phase de production dès que possible. « Si le résultat est concluant, pourquoi pas faire du café ? interroge Didier Tcha. Localement, il n'y en a pas encore. » Pour les membres de la Direction de l'agriculture et de la forêt, implanter des caféiers chez des agriculteurs n'est que la seconde phase du projet. Comme Didier Tcha, ils sont une dizaine d'agriculteurs à prendre part à l'expérience. Une deuxième vague d'expérimentation devrait également commencer en janvier chez de nouveaux agriculteurs. Ce n'est qu'après qu'on saura réellement si la filière pourra être viable chez nous.
PAS AVANT 5 ANS...
Outre les exploitants déjà en activité, d'autres personnes sont intéressées par la production de café. Parmi elles, un groupe à Saint-Laurent, des jeunes en insertion à Apatou et une association à Roura. Alexandre Naïmi est membre de cette dernière.
L'homme est torréfacteur et produit, en Guyane, le café Emeraude (lire par ailleurs). « Tout se goupillait assez bien, explique-t-il. Mais maintenant, rien ne bouge. Les membres de l'association sont toujours en attente des attributions de parcelles sur la piste de Nancibo. » Idéalement, Alexandre Naïmi voudrait commencer les plantations en début d'année. Pour lui, si l'attribution des parcelles prend du temps, c'est parce que les membres de son association sont des pluriactifs. Pour Michel Briere, chef du service foncier, économie agricole et forestière à la Daf, ce laps de temps n'est pas irrégulier. Cependant, il confirme que le groupe de Roura pose effectivement quelques questions, notamment sur « la compétence de ces personnes » . Michel Briere rappelle également, que le développement de la filière ne pourra se faire qu'après la phase expérimentale qui vient de commencer chez les agriculteurs. Résultat, il devrait se passer au moins cinq ans avant d'imaginer une production de café.
Autre certitude, le café guyanais ne fera jamais l'objet d'une production de masse. D'une part parce que le coût de la main-d'oeuvre locale ne permettrait pas de concurrencer les plus grands pays producteurs de café et notamment le voisin brésilien.
D'autre part parce que pour pousser chez nous, les pieds d'arabusta doivent bénéficier de terrains idéalement situés et pas trop humides. Il s'agira donc d'une production pour une agriculture familiale, pour une cueillette à la main, et tourné vers l'exportation avec un label Guyane. Pour Marc Berthouly, chef du projet au Cirad, la Guyane pourrait suivre l'exemple de La Réunion et de son café, le Bourbon Pointu, un café dédié à l'exportation et qui peut se vendre une quinzaine d'euros la tasse dans les grands restaurants parisiens. Sachant qu'une production, plus light, se fait également pour alimenter le marché local.
Les plants sont cultivés à Sinnamary par le Cirad. Ils sont ensuite mis en exploitation chez des agriculteurs, toujours dans une phase d'expérimentation. (AV)
Les plants sont cultivés à Sinnamary par le Cirad. Ils sont ensuite mis en exploitation chez des agriculteurs, toujours dans une phase d'expérimentation. (AV)
- Que devient le café Emeraude ?
Depuis plusieurs mois, difficile de trouver du café Emeraude. Le produit, issu de différents cafés, était torréfié et commercialisé chez nous. Il y a huit mois, la société de torréfaction, Guyane café industrie a fermé son centre de production. Il est actuellement en cours d'emménagement à Degrad des Cannes et devrait rouvrir sous peu.

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