Le Conseil constitutionnel invalide les dérogations aux distances d’épandage de pesticides

Le Conseil constitutionnel invalide les dérogations aux distances d’épandage de pesticides

Rédaction web (avec AFP)
Au Prêcheur, l'arrêté municipal anti-pesticides du maire a été attaqué par l'Etat.
Au Prêcheur, l'arrêté municipal anti-pesticides du maire a été attaqué par l'Etat.

Ce vendredi (19 mars), le Conseil Constitutionnel a estimé que les « chartes d’engagements », rédigées au niveau départemental et censées encadrer l’usage des pesticides près des habitations, sont « contraires » à la Constitution.

Les associations et ONG écologistes obtiennent gain de cause. Ce vendredi (19 mars), le Conseil constitutionnel a jugé que la méthode d’élaboration des chartes locales qui permettent de réduire les distances de sécurité entre les habitations et les zones d’épandage de pesticides était anticonstitutionnelle.
Ces chartes d’engagement rédigées au niveau départemental permettent, selon un décret de 2019, de réduire les distances entre zones d’épandage et habitations de cinq à trois mètres pour les cultures dites basses (légumes, céréales…) et de dix à cinq mètres pour les cultures hautes, fruitiers ou vignes.
En décembre 2019, après plusieurs mois de polémiques, le gouvernement avait finalement fixé les distances minimales à respecter entre les zones d’épandage de produits phytosanitaires et les habitations : cinq mètres pour les cultures dites basses comme les légumes et céréales et dix mètres pour les cultures hautes, fruitiers ou vignes.
Mais le décret prévoyait également des dérogations ramenant ces distances à trois mètres pour les cultures hautes et cinq pour les basses, dans le cadre de « chartes d’engagement départementales » proposées par les utilisateurs de produits phytosanitaires et validées par les préfets après avoir été soumises à concertation publique. Chartes qui prévoient notamment que l’agriculteur utilise des équipements limitant la dérive, c’est-à-dire le dépôt en dehors des zones traitées.

Le Conseil constitutionnel saisi
De nombreuses associations environnementales, dont Générations Futures et France Nature Environnement, avaient saisi le Conseil d’État en 2020, dénonçant des chartes qui selon elles ne protégeaient pas suffisamment les riverains.
Le 4 janvier dernier, le Conseil d’État a finalement saisi le Conseil constitutionnel d’une « question prioritaire de constitutionnalité » sur cette question. C’est la méthode d’élaboration de ces chartes que le Conseil constitutionnel a invalidée ce vendredi 19 mars.
« Les dispositions contestées se bornent à indiquer que la concertation se déroule à l’échelon départemental, sans définir aucune autre des conditions et limites dans lesquelles s’exerce le droit de participation du public à l’élaboration des chartes d’engagements », écrit-il dans sa décision.
« D’autre part, le fait de permettre que la concertation ne se tienne qu’avec les seuls représentants des personnes habitant à proximité des zones susceptibles d’être traitées par des produits phytopharmaceutiques, ne satisfait pas les exigences d’une participation de toute personne qu’impose l’article 7 de la Charte de l’environnement », poursuit-il. Par conséquent, ces dispositions « doivent être déclarées contraires à la Constitution ».

Au Prêcheur, l'arrêté anti-pesticides suspendu
C’est un nouveau rebondissement dans une affaire qui fait polémique depuis plusieurs années. En juin 2019, le Conseil d’État avait déjà jugé qu’un arrêté de 2017 réglementant l’utilisation des produits phytosanitaires ne protégeait pas suffisamment la santé des riverains ni l’environnement, obligeant l’État à revoir sa copie.
D’où les nouvelles mesures prises fin 2019 dans un contexte de fronde de maires et de collectivités locales, qui avaient multiplié les arrêtés limitant ou interdisant l’usage de pesticides sur leur territoire. Au Prêcheur, Marcellin Nadeau a été le premier maire -et le seul à notre connaissance aujourd’hui- à avoir pris un arrêté anti-pesticides sur son territoire, dès le 17 février 2020.
L’Etat avait attaqué considérant que le maire n’est pas habilité à prendre des décisions concernant « la police spéciale des produits phytopharmaceutiques », mais que cette compétence revient aux ministres de l’Agriculture, de la Santé ou de l’Environnement selon les cas, ou au préfet du territoire où ils sont utilisés. Le tribunal administratif de Martinique, puis la cour administrative d’appel de Bordeaux, ont donné raison à l’Etat et suspendu l’arrêté municipal.

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