Ce grand homme noir arrive de sa campagne, de Bezaudin où de Gallardbois, pour un peu de vie, un peu d’espoir en ville. Il est perclu de douleurs, de sa misère, de son ventre vide, baragouinage des mots à peine audibles, mais ses maux sont bien visibles, bien réels.
Soudain, l’homme se redresse et son grand corps noir s’ébranle, fait face au monde et nous voilà au cœur d’un voyage, dans notre histoire, dans notre imaginaire que conduit Jacques Martial avec le texte fondamental d’Aimé Césaire dans « Cahier d’un retour au pays natal ».
Le comédien, Jacques Martial, nous fait vivre des moments palpitants. Lui dressé devant cette carte du monde réinventée aux formes diverses. Dans cet espace du théâtre de l’épée des bois à Vincennes, sur scène, il est le gardien, le créateur, le guide de cette fin de nuit, de cette matinale, de ce bout de petit matin, son autre monde. Il est transformé, herculéen, magistral. Il s’empresse d’effacer ses souvenirs pour éclairer sa vérité et sa conscience.
Il nous emporte dans sa vision. « Ce qui est dit là, “ Le temps de se ceindre les reins comme un vaillant homme. La carte du printemps est toujours à refaire. On ne lâche rien, on recommence, on recommence’’. Je pense que cet urgent de le dire. Tout cela était vrai hier, c’est vrai aujourd’hui, tout cela sera encore vrai demain. C’est une urgence », explique le comédien Jacques Martial à la fin du spectacle.
Jacques Martial a la carrure, le physique, le langage, le sens aigu du verbe, de la fête, les gestes conçus, le silence, l’éruption de rage, pour nous transporter, pour nous laisser penser et nous ressaisir durant quatre-vingt-dix minutes de ce fabuleux spectacle, le Cahier d’un retour au pays natal. Il nous emporte avec lui dans cette interprétation. C’est une complète réussite.