Maître Jean-Claude Beaujour, avocat d'affaires et maître de conférences à l'ENA : « La notion d'exil n'est plus adaptée à la réalité du monde »

Maître Jean-Claude Beaujour, avocat d'affaires et maître de conférences à l'ENA : « La notion d'exil n'est plus adaptée à la réalité du monde »

Propos recueillis par B.P.
Quels sont selon vous les éléments objectifs qui conduisent à l'excellence ?
Je réponds ici à l'invitation du club Soroptimiste Fort de France Alizés-sud, afin de sensibiliser les managers de demain, et sans doute les étudiants des CPGE, à la pratique de la médiation et de la négociation. Aussi, rappelons que l'excellence c'est le fait d'atteindre un degré éminent de qualité, de valeur, et pour celui qui veut l'atteindre il lui faut selon moi satisfaire à trois critères : en premier lieu, il faut de la persévérance dans ce que l'on entreprend. On ne peut en effet parvenir à une forme de qualité avérée qu'au terme d'un travail acharné et nécessairement long. Ensuite, il faut une réelle humilité, car l'excellence ne va jamais de soi, elle ne se décrète pas ; elle résulte plutôt également de la capacité à progresser grâce à ses erreurs, voire au-delà des accidents de la vie qui peuvent émailler le parcours d'une personne. Quel que soit son talent, il est important d'accepter de se remettre en question, ou d'accepter l'échec comme une expérience et une occasion de progresser. Enfin, il faut une bonne dose de résilience car l'effort sur le long terme n'est possible que si on apprend à faire le deuil d'un événement qui nous a profondément touchés, et qu'on reprend confiance dans sa capacité de poursuivre sa route au-delà de cet événement qui peut avoir été terrible à surmonter. La bonne nouvelle c'est que l'être humain dispose en lui de réelles capacités, à surmonter les difficultés, voire les malheurs et à se reconstruire.
Les internats d'excellence tiennent-ils une place importante dans la réussite des jeunes ?
Assurément, et en particulier pour tous ceux qui n'ont pas la possibilité d'être dans un environnement porteur. En effet, si la réussite requiert de faire preuve de volonté, cette dernière peut se révéler insuffisante tant il faut un environnement propice. En effet, la saine émulation est déterminante, et il peut être particulièrement stimulant d'être entouré d'autres personnes poursuivant le même objectif. Les internats d'excellence sont de ce point de vue, propices à cette émulation encadrée. On pourrait dire qu'ils sont nécessaires pour apprendre à « chasser en bande » ! De plus en plus souvent cette expression ressort dans les communications de journaux économiques, dans la bouche de chefs d'entreprise. Pour autant elle résulte d'une culture que nous n'avons pas intuitivement en outre-mer ; alors les internats d'excellence peuvent être un des endroits où cette logique peut se développer entre des personnes qui conjuguent leurs talents pour faire face aux challenges professionnels qui se présenteront à elles.
Notre jeunesse en réussite n'est-elle pas condamnée à un exil doré hors de la Martinique ?
Je m'inscris en faux contre cette idée car ces deux notions de « condamnation » et d'« exil » ne me semblent plus adaptées à la réalité de notre monde devenu « global » . En effet, partir et découvrir le monde c'est un enrichissement, d'autant que l'espérance de vie professionnelle est d'au moins 40 ans aujourd'hui, et qu'elle sera faite de différentes étapes pouvant à tout moment permettre de revenir au bercail. D'autre part la Martinique, et d'une manière générale, les régions d'Outre-mer, ont tout intérêt à bénéficier de l'expérience de professionnels aguerris dans un environnement fortement compétitif qu'ils vont enrichir de connaissances acquises ailleurs.
L'étroitesse de nos territoires n'est pas un trop fort handicap ?
A défaut d'avoir la taille de grands pays, les régions d'Outre-mer se doivent de cultiver un haut niveau d'expertise. Je le vois ainsi à Singapour ou à Hong-Kong devenues aujourd'hui de vraies puissances économiques internationales. A titre personnel, puisque l'on parle de jeunes, mes deux aînés dont l'une est allée en Australie et l'autre à Shanghai, restent très attachés aux Antilles ; qui sait ce qu'ils y feront d'ici 20 ans lorsqu'ils se seront enrichis de par le monde ?
- Conférence sur le thème « Le Droit à l'Excellence » jeudi 12 décembre à 18h00 sur le Campus Universitaire de Schoelcher
- Colloque sur le thème de « La Médiation en droit des affaires » le samedi 14 décembre, à 9h à la CCIM

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