Les Haïtiens ont tout perdu, même le droit
d'enterrer leurs morts.
Le ballet macabre commence à être rodé.
Toutes les cinq minutes, un camion arrive au cimetière de
Port-au-Prince, décharge un, deux, plusieurs cadavres et remet les
gaz. Les corps sans vie des victimes du séisme de mardi sont jetés
à la va-vite dans une fosse commune creusée par les autorités
haïtiennes pour tenter de débarrasser les rues des cadavres qui
commencent à se décomposer. « Nous avons perdu toute dignité face à
la mort » , se lamente Mezen Dieu Justi, un vieillard, qui a bien
du mal à contenir nausée et larmes en passant devant le
cimetière.
Il n'est pas rare que certains observateurs
de ce morbide spectacle perdent toute contenance. Surtout lorsque
dans l'enchevêtrement de corps, ils reconnaissent une mère, un
frère ou un oncle. « C'était mon père, mon Saint Père! » ,
s'exclame une jeune fille, avant de perdre connaissance. Une autre
femme, qui semble possédée, descend dans la...